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J’ai découvert cet article sur la page Facebook de Cédric Armen, depuis, me sentant pleinement concernée, je ressens vraiment le besoin de réagir. (Lien ci-dessous)

Je me suis mise à parler de mes lectures sur internet parce que j’en avais assez de me sentir seule face à mes livres. Je ressentais le besoin de partager, de discuter autour de ce qui me plaît. Je parle de mes lectures sur Internet comme je parle de mes lectures quand je vais au club organisé par la médiathèque de mon quartier ou quand j’accompagne mes élèves dans la confection de leur journal du lecteur. La littérature ce n’est pas que des images mais passer par l’image pour parler de la littérature n’est – à mon sens – pas une vilaine chose. C’est souvent ce que l’on fait en classe et ça désacralise justement ce domaine auprès des élèves, ça rend le livre plus accessible et ce n’est pas sale.

Il est vrai qu’Instagram a été le réseau idéal pour ça puisque le livre une fois photographié attire le regard et parce qu’il attire le regard alors les gens s’y intéressent, les lecteurs, comme les non-lecteurs. Y a-t-il quelque chose de mal à vouloir attirer les gens justement vers cet objet livre que l’on met en scène ? que l’on rend objet du quotidien ? L’objectif étant de partager ce que l’on aime et donc de discuter autour de cette lecture et de ce qu’elle nous a apporté et finalement de faire lire.

Est-ce que c’est mal de banaliser les livres ? De les placer sur le bord d’une piscine en été ? A côté d’un bol de céréales ou d’une tranche de pain, d’une tasse café ? Est-ce mal de tenter de les rendre accessibles ? De faire en sorte qu’ils fassent partie du quotidien des lecteurs, justement ?

Aussi – et surtout (et c’est sans doute là que je me sens la plus blessée dans les propos de l’article) à aucun moment je n’ai eu besoin de “m’élever au-dessus de la masse” de me sentir “exceptionnelle” à travers mes lectures ou pire encore “de faire partie d’une aristocratie des lecteurs”, à aucun moment je n’ai ressenti le besoin de me sentir plus forte, plus intelligente parce que je lis. Jamais. Mais quelle serait alors même ma posture de professeur de français face à mes élèves ? Quelqu’un bourré d’orgueil, d’arrogance, de suffisance ! 

Croire ça, c’est croire que la littérature ne sert qu’à se mesurer aux autres et je trouve ça insupportable. Parler de ses lectures sur internet c’est justement faire en sorte de les rendre plus accessibles au plus grand nombre certainement pas de “s’élever au-dessus de la masse”. Je ne suis pas à la recherche d’une “caution intellectuelle” certainement pas ! Je n’en ai pas besoin. Je lis David Foenkinos, Agatha Christie et Jean Paul Didierlaurent, je lis aussi Victor Hugo, Jean-Jacques Rousseau ou Jean Paul Sartre, et surtout, je partage, je discute, je confronte mon point de vue, j’approfondis ma pensée, j’apprends auprès des autres, lecteurs et non lecteurs ! A quel moment cette démarche est-elle aristocratique ou arrogante ?

Par ailleurs, je trouve ça étrange de croire que la littérature ne parle pas de nous, qu’elle ne serait pas un prolongement de notre personne. Bien sûr qu’elle est un prolongement de soi ! La littérature parle forcément de nous, elle est nous, puisqu’elle fait partie du quotidien, puisque elle s’appuie sur l’humain, elle raconte l’humain pour pouvoir exister et vice-versa d’ailleurs. Depuis toujours les auteurs s’appuient sur le monde pour écrire, créer leur fiction, construire leur pensée ! Je n’ai pas besoin “d’adjuvants” je n’ai pas besoin de me sentir meilleure, au-dessus des autres. Je partage juste ma sensibilité, celle que je ressens quand je fréquente des textes. À quel moment suis-je “aristocratique” ? A quel moment suis-je orgueilleuse ??

Il est vrai que c’est tellement banal de montrer ses muscles, ses vêtements, de donner à voir son plus beau mascara ou son plus beau maquillage pourquoi ne serait-il pas possible de parler de livres sur Internet ?? Croire que la littérature ne peut pas être justement au même niveau que le maquillage ou les vêtements, alors c’est faire de la littérature quelque chose d’aristocratique.

Mme Géraldine Mosna Savoye, quelle est la plus aristocratique de nous deux ??