J’ai retrouvé dans ce livre le ton des discussions échangées dans les vestiaires de l’usine dans laquelle je travaillais l’été quand j’étais étudiante ; la spontanéité des employés, leur franc-parler, leur accent à couper au couteau, leur sympathie, leur franchise, leurs réflexions à la fois superficielles et profondément philosophiques ; tout ce qui les rendait déterminés, engagés, attachants.
J’ai retrouvé aussi l’ambiance particulière à la fois calme et pesante des longues files d’attente qui s’étendaient inexorablement devant le Pôle Emploi de ma ville ; les stages de CV, les appels téléphoniques au milieu d’un hall dépourvu d’intimité, les larmes amères … tout cela me revenait au fil des pages …
En 2008 j’avais 26 ans. Je reprenais mes études. J’entrais pour la première fois de ma vie à la fac après avoir accumulé des petits boulots.
Florence Aubenas fait de ce livre un arrêt dans le temps ; une page de l’histoire sociale de notre pays en mettant en avant ses principaux acteurs et en même temps les plus invisibles. Elle donne à voir la vie, telle qu’elle existait et qu’elle existe encore. Le travail se compte en « heures », les payes en quelques centaines d’euros. Ça secoue, ça refroidit, ça bouscule.
Il s’agit d’un ouvrage profondément humain, de ceux qui se battent pour exister, pour survivre.
Le quai de Ouistreham - Aubenas - Extrait 1
J’émets cependant une réserve sur les dialogues qui semblent parfois un peu trop écrits et qui manquent donc de spontanéité ou d’authenticité. Mis à part ce petit ressenti désagréable, cet ouvrage offre un regard critique sur quelques unes des grandes question de notre temps : le travail, la précarité. Un document saisissant.
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