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Cet ouvrage est en fait le portrait d’une femme, d’une marâtre, d’une mégère que l’on ne peut que détester et c’est sans doute ce qui rend le livre certes difficile mais aussi profondément intéressant. En fait, je crois que j’aime bien les personnages détestables …

Hervé Bazin nous donne à voir une enfance douloureuse pleine de vexations, d’humiliations et d’intimidations. Le petit Jean va, aux côtés de ses frères, tenter de vivre malgré les difficultés quotidiennes en présence d’une mère épouvantable au point parfois de commettre l’impensable.

Cet ouvrage est un récit d’enfance difficile mais le caractère du protagoniste, son talent et sa volonté – parfois morbide – ne le rend pas triste comme on pourrait le craindre. Il n’y a pas de discours misérabilistes dans ce roman, on ne cherche pas à faire pleurer le lecteur, les situations nous parviennent avec violence mais sans sensationnalisme, c’est très bien écrit.

“Ce n’est pas le nombre de vivants, c’est leur autorité qui meuble une maison.”

“On ne construit pas un bonheur sur les ruines d’une longue misère. Notre joie n’avait pas de boussole. Nous étions désorientés.”

Les personnages adultes masculins sont pour la plupart éteints et soumis, on peut ressentir pour eux une certaine pitié mais la ténacité de Jean prend le dessus, il est déterminé à vaincre sa mère et quelque part … on est de tout coeur avec lui …

Ce texte est présenté dans un style soigné et soutenu, ce qui en fait une réelle oeuvre littéraire assez remarquable à l’écriture raffinée :

“S’il fallait réfléchir ainsi, peser toutes les conséquences de ses actes, avant de sentir leur nécessité, je ne serais plus moi-même, je ne pourrais plus vivre.”

Et de nous proposer cette belle métaphore filée plus loin dans le texte :

“Pour la première fois, je fais le point. Il est bon, ai-je lu quelque part, de se replier quelquefois sur soi-même et, capitaine armé d’un sextant, de préciser sa position, parmi les courants, les vents, les idées et les voix de ce monde.”

Ce roman bouscule et dérange, comment une mère peut-elle traiter ainsi ses fils ? Comment en est-elle arrivée là ? Combien sont-elles à soumettre et à opprimer ainsi toute leur famille ? Ces questions font de Folcoche un personnage profond, extrême dont on n’aurait pas fini d’étudier la psychologie … Quel soufflet !