Sélectionner une page

C’est l’histoire d’un homme.
D’un jeune homme épris d’amour, de passion, d’ambition … de frustration aussi …
Ce jeune homme que nous suivons dans un premier temps sans connaître son prénom prend les traits d’un héros romantique au fur et à mesure de l’ouvrage.

Je trouvais les troubles de mon cœur, mes sentiments, mes cultes en désaccord avec les maximes de la société.

Raphaël souffre de ne pas pouvoir exister dans le regard des autres.

Le portrait du protagoniste peint tout au long de l’ouvrage semble souvent contradictoire, Raphaël est intelligent mais faible, à la fois fort et fragile, angélique et démoniaque, immature et définitivement adulte, sage mais fou, les oxymores parsèment d’ailleurs allègrement le texte :

“sa funeste puissance”

“une acclamation silencieuse” 

“cette agonie de la joie était une vivante image de sa vie”

Raphaël est insaisissable – surtout pour lui même – et est habité par une insatiable envie de se détruire comme ultime réponse à son mal être.

On apprécie le pouvoir de la description proposée par Balzac. Tel un orfèvre, le romancier travaille son texte, le cisèle, l’orne d’une langue à la fois élégante, riche et précise.
La description, c’est l’art qui se met au service du monde.

La peau de chagrin – objet symbolique qui représente tour à tour les rêves, les sacrifices, la fatalité – est un prétexte pour l’auteur de s’interroger sur la nature humaine. L’homme peut-il être sage ? A-t-il cette capacité de pouvoir justement se contenter de ce qu’il a ? Est-il capable de dominer ses sentiments ? Est-il capable de se satisfaire ? Jusqu’où un homme est-il prêt à aller pour tarir sa soif de pouvoir ?
Puis Balzac nous propose surtout une réflexion sur l’argent, ce qu’il apporte, ce qu’il permet, ce qu’il détruit surtout … Par ailleurs, les nombreux dialogues sont un prétexte à la réflexion sur la société, sur la vie, sur les femmes …

J’étais la proie d’une excessive ambition, je me croyais destiné à de grandes choses et me sentais dans le néant.

Le despotisme de mon père m’ayant ôté toute confiance en moi, j’étais timide et gauche […] je me déplaisais ; je me trouvais laid, et j’aurais honte mon regard.

Comment ne pas prendre conscience que la littérature a définitivement ce pouvoir de parler aux êtres …

Le sentiment que l’homme supporte le plus difficilement est la pitié quand il la mérite. – La haine est un tonique : elle fait vivre, elle inspire la vengeance, mais la pitié tue, elle affaiblit encore notre faiblesse.

Enfin, le surnaturel est instillé de part et d’autre de l’ouvrage avec délicatesse et discrétion proposant ainsi comme dimension tragique et fatale de la vie de Raphaël qui semble tout posséder mais en fin de compte ne rien maîtriser de sa destinée …

La peau de chagrin est à mon sens une oeuvre exigeante et dense à mi chemin entre réalisme et fantastique qu’il faut aborder avec une disponibilité d’esprit non négligeable. Une très belle oeuvre.